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Bloc 2 | Stratégies d’adaptation Stratégies d’adaptation à l’échelle mondiale

Auteur : Sebastian Weissenberger.

En comparant les stratégies d’adaptation d’un certain nombre de pays, on s’aperçoit que les trois principales approches – la protection, l’accommodement et le retrait – sont toutes adoptées, variant selon les circonstances de pays, et souvent de manière non-exclusive. On peut s’attendre à ce que la protection soit surtout favorisée dans des pays affluents et en présence d’un capital bâti important sur la côte, à l’exemple de certaines grandes villes européennes. Dans des pays disposant de moins de capital financier, là où les enjeux côtiers sont moins importants et lorsque l’utilisation du territoire permet d’adapter celle-ci à des conditions changeantes, l’accommodement s’offre comme solution.

Le Bangladesh est souvent cité comme exemple de pays ayant su s’accommoder aux impacts des changements climatiques. Le retrait est encore rarement envisagé de manière volontaire ou proactive. Pour certains petits États insulaires, comme Tuvalu, du fait de leur situation géographique, le retrait apparait inéluctabilité à long terme. Ces stratégies d’adaptation ne sont cependant pas monolithiques et évoluent avec le temps. Ainsi, le principe de défence à tout prix longtemps défendu par les Pays-Bas, incorpore progressivement l’accommodement et le retrait. Inversement, des pays comme l’Indonésie s’apprêtent à investir massivement dans des structures de protection.

Idéalement, le principe de précaution devrait être appliqué au développement des zones côtières, mais le legs du passé et des trajectoires de développement côtier qui sont fortement influencées par la pression démographique et l’attrait du littoral, ont tendance à rapprocher les enjeux de la côte et ainsi les mettre à risque des impacts des changements climatiques.

3.1 Retrait forcé : les petits états insulaires

Tuvalu s’est établi comme un symbole des conséquences dévastatrices des changements climatiques sur les petits États insulaires. En effet, ce petit État, le deuxième plus petit au monde après le Vatican avec 11 000 habitants, constitués de neuf îles habitées d’origine volcanique entourées de récifs coralliens, est situé en moyenne à 1,5 mètres au-dessus de la mer et son point le plus élevé culmine à 4 mètres (figure 1). Autant dire qu’en fonction des prévisions plausibles d’augmentation du niveau de la mer, il ne subsistera plus de partie habitable d’ici la fin du XXIe siècle.  La vente de son domaine internet (.tv) a permis au pays de doubler son revenu national de quatre millions de dollars, et grâce à ce revenu, de faire des démarches auprès des Nations unies et d’autres tribunes pour faire valoir la cause des petits États insulaires (KRON-TV, 2002 ; Berzon, 2006).

Figure 1. Funafuti, capitale de Tuvalu.

Source : Wikimédia commons.

Déjà présentement, les inondations se font fréquentes et l’intrusion d’eau salée dans les aquifères menace l’approvisionnement en eau douce, nécessitant la construction d’usines de désalinisation (NAPA Tuvalu, 2007). Les habitants essayent de protéger les côtes à l’aide de barrages improvisés avec plus ou moins de succès. À long terme, le retrait s’impose comme la solution inéluctable à la progression de la mer (Lewis, 1989) et est déjà inscrit comme recours ultime dans le Programme d’Action National d’Adaptation (NAPA Tuvalu, 2007). Cette option revient à relocaliser la population dans un autre pays, par exemple la Nouvelle-Zélande ou l’Australie. Depuis 2002, un programme d’immigration (Pacific Access Category) permet à 75 Tuvaliens par an de s’installer en Nouvelle-Zélande (MINPAC, 2002). Bien sûr, les impacts sociaux, en terme d’identité nationale, de perte d’un territoire d’attache, d’histoire et de liens affectifs et structurants les réseaux sociaux et familiaux, sont dramatiques.

Une telle solution est envisageable pour les 11 000 habitants de Tuvalu, elle l’est moins pour des pays insulaires plus grands comme les Maldives (328 000 habitants) ou les Seychelles (84 000 habitants). Peut-être que des solutions futuristes comme des villes flottantes pourront faire partie des solutions envisagées par les pays insulaires de faible élévation (figure 2), mais au prix de défis techniques et financiers considérables. Ce genre de projet soulève plusieurs questions. On peut se demander à qui s’adresse un tel projet. Au coût de 250 000 dollars par unité, les logements de la ville flottante sont abordables pour des investisseurs étrangers, mais difficilement pour les résidents locaux (Delbert, 2021). À long terme, il est difficile d’envisager l’avenir d’une ville flottante si le territoire avoisinant devenait submergé et les récifs protégeant le complexe n’étaient plus en mesure de croître à la vitesse de l’augmentation du niveau de la mer.

Figure 2. Le projet de ville flottante des Maldives, lancé en 2021 en tant que joint-venture entre le gouvernement des Maldives et l’entreprise néerlandaise Dutch Docklands.

Source : Maldives Floating city.

Il est ainsi compréhensible que les petits États insulaires, regroupés sous la bannière de l’AOSIS (Alliance of Small Island States) soient les plus fortement engagés dans les négociations internationales visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Lors des négociations de Kyoto, l’AOSIS a plaidé pour une réduction de 20 % des émissions (5,2 % ont été adoptés) et lors des négociations de Copenhague, pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C (le document final retient 2°C) (AOSIS, 2013). En tout, 50 millions de personnes vivent dans des petits États insulaires en développement (UNFCCC, 2005).

Au-delà du lobbysme politique, certains petits États insulaires, en l’occurrence Tuvalu et la Micronésie, ont évoqué la possibilité d’intenter des poursuites judiciaires contre les États-Unis et l’Australie, les deux pays industrialisés qui n’avaient pas ratifié le protocole de Kyoto, ou contre des entreprises émettrices de CO2 (Jacobs, 2005 ; Morris, 2010).

Les considérations sur la responsabilité historique et le droit à un dédommagement pour les dommages subis à cause des impacts des changements climatiques sont incorporés dans les négociations climatiques à travers le mécanisme de Varsovie relatif aux pertes et préjudice liés aux changements climatiques, créé en 2013, et toujours âprement discuté et largement ineffectif (Maljean-Dubois, 2018).

3.2 Protection comme solution technologique

Les protections côtières ont une longue histoire en Europe. Au cours de la deuxième moitié du 20e siècle et du début du 21e siècle, des projets de plus en plus imposants comme les Delta-Werken, le barrage de la Tamise ou le projet Moïse à Venise, ont été entrepris en réponse à des évènements extrêmes. À la suite des ouragans destructeurs des premières décennies du 21e siècle, des projets de protection de grande ampleur sont aussi à l’ordre du jour. Des pays asiatiques comme le Japon ou l’Indonésie, protègent également les grandes métropoles par des ouvrages de protection imposants comme G-Cans ou Garuda. Les mégaprojets de protection côtière (et fluviale dans certains cas), semblent donc voués à se multiplier en réponse d’un côté à l’impact des changements climatiques et à l’augmentation du niveau de la mer, et de l’autre côté à la croissance de la population côtière, surtout dans les mégapoles. La protection de territoires entier à long terme est cependant illusoire.

3.2.1 Les Pays-Bas

Les Pays-Bas sont l’exemple type d’un pays qui implémente la protection à l’échelle nationale et à grands frais, et ce pour cause, puisque non seulement il s’agit du pays le plus densément peuplé en Europe (plus de 400 habitants/km2), mais aussi parce qu’une partie importante du territoire national est sous le niveau de la mer, incluant les “polders” (terres émergées) créés au prix d’efforts considérables à travers le projet du Zuidersee (Figure 3). Depuis la fin des années 1920, ce bras de mer a été progressivement transformé en un lac d’eau douce, l’Ijselmeer, après sa séparation de la mer par une grande digue de 32 km de long. À cette occasion, plusieurs polders ont été gagnés sur les flots par endiguement et assèchement.

Figure 3. Le projet du Zuiderzee dans le nord des Pays-Bas. En blanc, les polders gagnés sur la mer.

Source : modifié d’après NASA, Wikimédia commons.

La construction de digues a une longue histoire aux Pays-Bas et dans l’Allemagne voisine puisqu’elle remonte au X-XIIe siècle. La construction de l’« Anneau d’Or » encerclant l’ensemble de la côte de la mer du Nord a été achevée en 1300 (Erchinger, 2001). Ces digues n’ont pas su éviter des inondations catastrophiques, comme celle du 16 janvier 1362, l’inondation de la Saint-Marcel ou « grande noyade » (grote mandrenke), qui provoqua la pert de dizaines de milliers de vie, de 100 000 ha de terres, la disparition de plusieurs îles ainsi que de la ville de Rungholt en Frisie septentrionale, longtemps considérée légendaire jusqu’à ce que ses vestiges n’aient été retrouvés en 1938, ou encore l’inondation de Burchard ou « deuxième grande noyade » en 1634, qui causa entre 8000 et 15 000 décès (Figure 4).

Figure 4. La « deuxième grande noyade » de 1634 selon un artiste contemporain.

Source : Wikimédia commons.

En conséquence, la hauteur des digues a progressivement augmenté. Alors qu’elle n’était que de 1,5-2 m au moyen-âge, elle est passée à 3-5 m à partir du XVIe siècle, après la tempête de 1953, leur hauteur a été fixée à 7,56 m (Figure 6) (Ecomare, 2013 ; Erchinger, 2001). Cette tempête causa plus de 2 000 morts dans les pays riverains de la mer du Nord et a catalysé les projets de la barrière de la Tamise en Angleterre et des Delta-Werken aux Pays-Bas (Figure 5).

Figure 5. La tempête de 1953 en mer du Nord.
Photo illustrant l'ampleur des inondations suite à la tempête de 1953 en mer du Nord.

Source : Wikimédia commons.

Figure 6. Hauteur successive des digues aux Pays-Bas : en haut à gauche les anciennes digues de sable (3,45 mètres), en haut à droite les digues du complexe de Zuiderzee en sable et en argile (4,30 mètres), en bas les digues du complexe Delta en sable, argile et argile à blocaux (7,56 mètres). NAP (nl : Normaal Amsterdams Peil) = niveau normal d'Amsterdam, le niveau de référence zéro aux Pays-Bas.
 Trois dessins montrant l'évolution de la hauteur et de la composition des digues aux Pays-Bas au fil du temps. Des précisions dans le titre de la figure.

Source : Ecomare, 2013.

Le niveau de sécurité des barrages des Pays-Bas est considéré exemplaire au monde. Le niveau de risque d’inondation accepté est adapté à l’utilisation du territoire et à l’infrastructure à risque (Figure 7). Ainsi, la partie centrale comportant les plus grandes villes du pays est protégée contre une crue de 10 000 ans : Den Haag (la capitale), Amsterdam (quatrième plus grand aéroport en Europe) et Rotterdam (plus grand port d’Europe). Les régions moins peuplées sont protégées contre un risque moins élevé.

Figure 7. Carte des zones d’inondation aux Pays-Bas.
 Carte montrant le niveau de protection variable contre les inondations dans les différentes régions des Pays-Bas, en fonction des enjeux.

Source : adapté de Bruine, 2006, Appendix A, iii.

Cependant, ces digues ne sont pas sans conséquences écologiques et esthétiques et des questions sur le bienfondé de la politique de la protection totale surgissent depuis plusieurs années. Afin d’éviter la stagnation et l’eutrophisation des eaux intérieures et permettre la navigation, certains barrages sont amovibles, restant en position ouverte la plupart du temps et en position fermée lors de tempêtes et marées exceptionnelles (Figure 8, Figure 9). Le barrage de l’Oosterschelde, construit selon ce principe en 1986, a couté deux milliards d’euros, beaucoup plus que ce qu’aurait couté un barrage fermé (Deltawerken, 2007). Le barrage sur le port de Rotterdam (Maeslantkering en néerlandais) est formé de deux barrières pouvant être fermées et 15 minutes lorsqu’il y a risque d’inondation. Il a coûté 450 millions d’Euros au début des années 1990.

Figure 8. Barrage amovible aux Pays-Bas, la Oosterschelde des Deltawerken ouvert et fermé.
 Deux photos montrant le barrage Oosterschelde des Deltawerken ouvert et fermé pendant une tempête.

Source : SkyPictures, et Rijkswaterstaat - Adviesdienst Geo-Informatie en ICT (AGI).

Figure 9. Barrage amovible aux Pays-Bas, le Maeslantkering dans le Port de Rotterdam ouvert et fermé.
Deux photos montrant le barrage Maeslantkering dans le Port de Rotterdam ouvert et fermé.

Source : Rijkswaterstaat - Adviesdienst Geo-Informatie en ICT (AGI).

3.2.2 Londres, Venise, Saint-Pétersbourg

D’autres villes comme Londres, Venise et Saint-Pétersbourg se sont aussi dotées de barrières amovibles. Le barrage de la Tamise en aval de Londres consiste en un ensemble de 520 mètres de large constitué de 10 barrières horizontales à cylindres rotatifs qui ont été mises en service en 1982 (Figure 10). La réflexion sur ce type de protection avait été entamée, comme aux Pays-Bas, après la tempête et les inondations de 1953. Pour compléter le système de défense, 18 km de digues ont été renforcées. Les barrières sont actionnées lorsque le niveau d’eau projeté pour le centre de Londres dépasse 16 pieds (4.87 mètres). Depuis son inauguration par la reine Elisabeth en 1984 et janvier 2022, la barrière a été fermée 203 fois (Environment Agency, 2022). Aucune inondation dans la grande région de Londres n’a été à déplorer depuis.

Figure 10. Le barrage de la Tamise.
 Photo du barrage de la Tamise.

Source : Wikimédia commons.

Pour plus d’information sur le barrage de la Tamise, consultez la vidéo intitulée How the Thames Barrier protects London from flooding de l’Environment Agency (2 minutes).

Le projet Moïse (MOSE en italien pour MOdulo Sperimentale Elettromeccanico, module expérimental électromécanique) à Venise est constitué de trois séries de barrages hydrauliques qui peuvent fermer les trois brèches dans le cordon dunaire par lesquelles la lagune de Venise communique avec la mer Méditerranée et ainsi isoler la lagune en entier en cas de crue extrême (Figure 11, Figure 12). Ceci doit permettre d’éviter les inondations, appelées acqua alta, dans la ville de Venise, patrimoine mondiale de l’UNESCO et construite sur des centaines de milliers de pieux sur 118 îles marécageuses. L’augmentation du niveau de la mer rendra très certainement des acqua alta exceptionnelles comme celle de 1966 plus fréquentes dans le futur (Munaretto et al, 2012). Le projet Moïse avait été planifié dès 1984, mis en chantier en 2004 et achevé en 2020 ; sa première utilisation ayant eu lieu le 3 octobre 2020 (Buckley, 2021).

Figure 11. Carte pour localiser les barrages du projet Moïse à Venise.
 Image satellite de la lagune de Venise montrant les trois goulots qui la connectent à la mer Méditerranée.

Source : site web du projet Moïse.

Figure 12. Illustration du fonctionnement des barrages du projet Moïse.
Illustration du fonctionnement des barrages du projet Moïse.
Illustration du fonctionnement des barrages du projet Moïse.
Illustration du fonctionnement des barrages du projet Moïse.

Source : Wikimédia commons.

Consultez un blogue dédié à l’histoire de Venise pour en apprendre davantage sur la géographie très singulière du lieu. 

Saint-Pétersbourg, la ville fondée en 1703 par Pierre le Grand à l’embouchure de la Neva sur le Golfe de Finlande, est régulièrement proie aux inondations. Depuis sa fondation, plus de 300 inondations ont été enregistrées, dont certaines avec des niveaux d’eau de trois et même quatre mètres au-dessus de la normale, causant des dégâts importants et des pertes en vies humaines (Kosterin et Shchekachikhin, 2017).

C’est en réponse à ce risque d’inondation que le système de barrage de protection de Saint-Pétersbourg (encore appelée Leningrad au début du projet) a été mis en chantier en 1979 et terminé en 2011, après une interruption de 1987 et 2005 pour des raisons politiques, économiques et écologiques (Water Technology.net, n.d.). Le barrage fait 25 kilomètres de long et s’appuie sur l’île de Kotlin (Figure 13). Il est haut de huit mètres, pour pouvoir protéger la ville contre des ondes de tempête jusqu’à cinq mètres de hauteur, encore jamais observées, mais théoriquement possibles (Kosterin et Shchekachikhin, 2017).

Deux passages pour la navigation ont été aménagés, qui peuvent être fermés à l’aide de portes mobiles géantes (Figure 14). Le barrage sert en même temps d’autoroute de contournement pour la ville. Depuis la mise en service du complexe, aucune inondation n’a touché la ville de Saint-Pétersbourg, grâce à une douzaine de fermetures des portes mobiles, en date de 2021 (Voiland, 2021). Le complexe a coûté 3,85 milliards de dollars (Voiland, 2021), mais aura déjà permis d’éviter des dommages estimés à 1,3 milliards durant les cinq premières années de service (Kosterin et Shchekachikhin, 2017).

Figure 13. Situation géographique du barrage de Saint-Pétersbourg.
 Sur une carte satellite est situé le barrage de Saint-Petersbourg.

Source : NASA, 2020.

Figure 14. Portes mobiles du barrage de Saint-Pétersbourg.
 Photo des portes mobiles du barrage de Saint-Petersbourg.

Source : Wikimédia commons.

3.2.3 Tokyo

Tokyo, capitale du Japon et région métropolitaine la plus peuplés du monde, est menacée par les inondations fluviales, surtout lors des typhons accompagnés de précipitations extrêmes, comme le typhon Ida en 1958 avec 400 mm de pluie en une semaine, le 1947 typhon Kathleen en 1949, qui fit 1 100 victimes, ou le typhon Mireilles en 1991, qui détruisit 31 000 bâtiments (Ortiz, 2018).

L’ancien nom, Edo, signifiait estuaire, soulignant l’importance de la position géographique à l’embouchure du fleuve Sumida dans la baie de Tokyo. En tout, une douzaine de rivières traversent la plaine de Kanto, dont 5 ou 6 peuvent être considérées comme majeures (Realestate Tokyo, 2022).

Pour réduire le risque d’inondation, Tokyo a construit, entre 1992 et 2006, le plus grand système de stockage et diversion d’eau au monde, le Metropolitan Area Outer Underground Discharge Channel, aussi nommé G-Cans, du japonais gesuikanaru signifiant canal, consistant en une série de cinq systèmes des digues, bassins de rétentions, et de conduits d’évacuation, alimentés par des pompes d’un total de 14 000 chevaux vapeur, permettant d’évacuer 200 tonnes d’eau par seconde vers le fleuve Edo lors de précipitations extrêmes (De Graaf et Hooimeijer, 2008 ; Water Technology Net, 2012).

Ces constructions ont permis de réduire la superficie inondée de 85 hectares à 5 hectares lors de typhons excédant 280 mm/h de précipitations (Tokyo Metropolitan Government, 2008). Le plus grand des réservoirs, celui de Kanda River/Loop Road No.7, peut stocker plus de 500 000 m3 d’eau (Figure 15, Figure 16) (ANMC21, n.d.).

Figure 15. Vue d’ensemble du chenal de décharge souterrain de la région métropolitaine.
Coupe transversale de la Baie de Tokyo montrant les rivières la traversant et le chenal de décharge souterrain avec ses 5 réservoirs.

Source : Edogawa River Office, Ministry of Land, Infrastructure, Transport, and Tourism. https://www.nippon.com/en/views/b06302/?pnum=2 

Figure 16. Le système d’évacuation des crues à Tokyo : réservoir du Kanda River Loop Road No. 7.
Le système d’évacuation des crues à Tokyo. La photo montre le réservoir du Kanda River Loop Road No. 7, partie du système d’évacuation des crues à Tokyo. Les figures humaines illustrent les dimensions colossales de l’ouvrage.

Source : Wikimédia commons

Néanmoins, certains chercheurs proposent que le niveau de risque soit revu à la hausse, au-delà de celui d’évènements passés, considérant l’augmentation du niveau de la mer et le réchauffement rapide des eaux de la mer du Japon, 0,7-1,6°C en 100 ans comparé à une moyenne mondiale de 0,5°C, une explication possible pour les typhons importants observés au cours des années 2000 (Betros, 2008). Présentement, le système G-Cans est capable d’absorber un évènement de 200 ans (Water Technology Net, 2012). En parallèle aux structures de protection et d’évacuation des eaux, le rachat progressif de terrains dans des zones inondables et leur désignation comme terrain inconstructible inondable est également considéré (Otake, 2011). Des exercices d’alerte et d’évacuation sont régulièrement exécutés avec la participation des services d’urgence et de la population, comme la ville le fait aussi pour les tremblements de terre. Il est à noter que ce n’est pas la première initiative de contrôle des crues à Tokyo puisque déjà au XVIIe siècle, les premiers Shogun Ieyasu Tokugawa avaient dévié le fleuve Tonegawa pour qu’il se déverse directement dans le Pacifique au lieu de traverser Tokyo, travaux qui avaient duré trois générations (Cooper et Matsuda, 2013). 

3.2.4 Projet Garuda (Jakarta)

Un projet particulièrement ambitieux, le projet Garuda, est planifié en Indonésie, pour protéger la capitale Jakarta, sur l’Île de Java, des inondations et de l’augmentation du niveau de la mer La mégapole indonésienne est une des villes connaissant le plus haut taux de subsidence au monde, résultant d’une combinaison d’un sol alluvial encore en cours de compaction, d’une surexploitation des aquifères et d’un poids trop important des infrastructures de la ville de plus de 10 millions d’habitants et plus de 30 millions d’habitants dans sa région métropolitaine (Abidin et al, 2013, 2015).  À cause de son exposition, des enjeux importants et des inondations fréquentes, elle est considérée comme la ville du sud-est asiatique la plus vulnérable aux impacts des changements climatiques (Firman et al., 2011 ; Yusuf and Fransisco, 2009, dans Jakarta City Team, 2010).

La ville, fondée sous le nom de Sunda Kelapa au 4e siècle et choisie comme capitale des Indes orientales néerlandaises en 1619 sous le nom de Batavia, est placée sur un site peu approprié dans un bassin de faible élévation parcouru par treize rivières (KPPIP, 2016). Les efforts des colonisateurs néerlandais d’endiguer les rivières ont été aussi peu efficaces que les efforts plus récents d’acheminer l’eau potable de l’extérieurs pour enrayer la chute de la nappe phréatique, inspirés de ce qui avait été fait à Tokyo dans les années 1960 (Sherwell, 2016).

Le projet Garuda, nommé d’après l’oiseau-dieu hindou, symbole national de l’Indonésie, et dont il adopte la forme (Figure 17), vise à construire une grande digue habitée de 35 km de long dans la baie de Jakarta, afin de protéger la ville des submersions marines lors de tempêtes (Sherwell, 2016). En parallèle, ces nouveaux territoires réclamés de la mer (qu’on appelle polders, terme néerlandais), seraient capable de loger entre 300 000 et 600 000 habitants. Le coût du projet s’élèverait à 40 milliards de dollars étalés sur 30 ans de construction (Dutch Water Sector, 2014).

Figure 17. Simulation visuelle du projet Garuda à Jakarta.

Source : Gouvernement des Pays-Bas/NCID.

Cependant, de nombreux problèmes sont à anticiper en conséquence de cet ouvrage. Du point de vue de l’environnement, la création d’un lagon semi-fermé laisse peser la menace d’une pollution qui ne serait pas évacuée assez rapidement, et donc d’une diminution de la qualité de l’eau (Maritime Affairs and Fisheries Ministry, dans Jakarta Post, 2015). La pollution par le plastique, déjà un problème de nos jours (Figure 18) s’aggraverait sans doute. Des eaux stagnantes sont également propices au développement des moustiques vecteurs de la malaria. Un déclin de la qualité de l’eau serait par ailleurs préjudiciable à la pêche artisanale pratiquée dans la Baie de Java par des dizaines de milliers de pêcheurs (Salim et al., 2019).

Figure 18. Ramasseur de plastique flottant sur une embarcation improvisée dans la baie de Java.

Source : Kemal Jufri/The Guardian, 2016 .

Les impacts sociaux seraient tout aussi considérables. Alors que des nouveaux quartiers luxueux seraient développés sur les polders (Figure 19), des quartiers populaires entiers seraient détruits, qu’il s’agisse d’établissements formels ou informels, dont certains quartiers sino-indonésiens (Leitner et Sheppard, 2017). La fabrique sociale, architecturale et urbaine de la ville serait donc transformée (Wade, 2019). Or, les acteurs locaux déplorent le manque de consultation menée auprès d’eux (Sherwell, 2016). La forte dominance étrangère du projet contribue à la perception qu’il s’agit d’un projet mené par-dessus les préoccupations des habitants même de la ville. Le fait qu’il s’agisse en plus de l’ancienne puissance coloniale rajoute un élément de débat politique, même si les Pays-Bas sont considérés comme le pays ayant la meilleure expertise en lutte contre les inondations et l’augmentation du niveau de la mer (Colven, 2017, 2020).

Figure 19. Image de synthèse d’un nouveau quartier affluent du projet Garuda.

Source : Kemal Jufri/The Guardian, 2016 .

En janvier 2022, l’Indonésie a décidé de construire à l’horizon 2045 une nouvelle capitale, Nusantara, devant être située sur l’Île de Kalimantan (anciennement Bornéo) plutôt qu’à Java et à l’écart des problèmes de submersion et d’inondation (France Culture, 2022). D’un à deux millions de personnes seraient relocalisées de Jakarta à Nusantara. Le financement du projet de 30 milliards de dollars reste cependant encore largement incertain (Llewellyn et Naem, 2022). Ce plan soulève aussi de nombreuses questions par rapport à l’impact de ce nouveau centre urbain sur la forêt tropicale de Kalimantan, même si le site lui-même est présentement couvert par des plantations d’huile de palme (Ware et Merino, 2022).

Saviez-vous ? Une mégalopole

« Une mégapole (« megacity » en anglais) est une très grande agglomération, qui se caractérise généralement par la présence en son sein de fonctions politiques et économiques majeures. Elle possède une aire d'influence d'ordre international, voire mondial. L'ONU a fixé le seuil d'une mégapole à 10 millions d'habitants ».

Source : article sur la mégalopole de Wikipédia

Sous l’effet combiné de la croissance de la population mondiale et de l’urbanisation de plus en plus prononcée, le nombre de mégapoles ne cesse de grandir : 2 dans les années 1950 (New York et Tokyo), 3 en 1975 (Mexico, New York, Tokyo), 7 en 1980 (New York, Tokyo, Mexico, São Paulo, Shanghai, Osaka, Buenos Aires), 24 en 2003, 28 en 2014, 33 en 2018. De ces 33 mégapoles, 19 sont en Asie, 6 dans les Amériques, 4 en Afrique et 4 en Europe.

Sources : World Population History,  Axios, article sur les megacities de Wikipedia.

3.2.5 Perspective à long terme de la protection

L’efficacité de ces systèmes de protection ne fait en règle générale pas de doute. Les barrages du système Delta ont été fermés une seule fois, lors de la tempête de l’automne 2007 avec des niveaux d’eau de 3,43 m au-dessus du niveau normal et les inondations ne causèrent que 500 000 Euros de dégâts dans l’ensemble du pays (rp-online, 2007). Dans le sud de l’Angleterre, aucune défaillance de barrage, ni de dommages matériels ou humains n’ont encore été à déplorer depuis la construction du barrage de la Tamise, seules quelques évacuations ont été effectuées par précaution (Naughton et Pavia, 2007). Le projet Moïse a cependant connu quelques ratés puisqu’en raison de prévisions de niveau d’eau erronées le système n’a pas été activé à temps en décembre 2020 (Hughes, 2020).

À long terme, cependant, l’efficacité de ces entreprises aux coûts pharaoniques (environ 6 milliards de dollars pour les Delta-Werken, 730 millions pour le barrage de la Tamise, 6 milliards pour le projet MOSE, 4 milliards pour le barrage de Saint-Pétersbourg, 2 milliards pour le G-Cans, en dollars de 2007 à 2020), 40 milliards projetés pour le projet Garuda, n’est pas assurée, lorsque l’augmentation du niveau de la mer est prise en compte.

Présentement, le barrage de la Tamise protège contre une inondation de 5000 ans, en 2030 ce serait encore contre un évènement de 1000 ans, mais à la fin du siècle tout juste une inondation de 50 ans (London Assembly, 2002). Au cours des 40 ans de service, la fréquence de fermeture de la barrière de la Tamise a augmenté de 2–3 fois par an durant les premières années à 6–7 fois par an à partir des années 200, avec un pic de 50 fois en 2013–14 (Figure 20, Tableau 1). À terme, possiblement en 2070 selon l’Environment Agency, le barrage de la Tamise devra donc être remplacé par un ouvrage de plus grande ampleur (EA, 2012).

Dans le cas du projet Moïse, une augmentation du niveau de la mer de plus de 50 cm obligerait une fermeture des barrières plus de la moitié du temps, plutôt que les 5 jours par an anticipés, aggravant les problèmes d’eutrophisation, de désoxygénation et de pollution de la lagune (Del Bello, 2018). À partir d’une augmentation du niveau de la mer de 100 cm, la ville ne serait plus adéquatement protégée (Umgiesser, 2020).

Figure 20. Fréquence de fermeture de la barrière de la Tamise de 1982 à 2022.

Source : Thames estuary partnership Website.

Tableau 1. Fréquence de fermeture de la barrière de la Tamise de 1982 à 2022.
Année Inondation due aux marées Inondation fluviale ou due aux marées
1982-1983 1 0
1983-1984 0 0
1984-1985 0 0
1985-1986 0 1
1986-1987 1 0
1987-1988 0 0
1988-1989 1 0
1989-1990 1 0
1990-1991 2 3
1991-1992 1 0
1992-1993 4 0
1993-1994 3 4
1994-1995 2 2
1995-1996 3 0
1996-1997 1 0
1997-1998 1 0
1998-1999 2 0
1999-2000 3 3
2000-2001 16 8
2001-2002 3 1
2002-2003 8 12
2003-2004 1 0
2004-2005 4 0
2005-2006 3 0
2006-2007 8 0
2007-2008 6 0
2008-2009 1 4
2009-2010 3 3
2010-2011 0 0
2011-2012 0 0
2012-2013 0 5
2013-2014 9 41
2014-2015 1 0
2015-2016 1 0
2016-2017 2 0
2017-2018 4 0
2019-2020 9 0
2020-2021 2 4
2021-2022 2 0

Source : Thames estuary partnership Website.

Des réflexions à l’encontre des stratégies de protection à tout prix s’articulent ainsi en Europe. À Venise, plusieurs solutions alternatives au projet Moïse ont été proposées, qui garantiraient un niveau de protection comparable. Ces mesures incluent la stabilisation des dunes, la localisation des ports profonds pour pétroliers à l’extérieur de la lagune, et une meilleure évacuation des eaux dans le sous-sol de la ville jumelée à une imperméabilisation du centre historique (Robbins, 2019). Dans une consultation d’experts menées en 2006, ces projets étaient cependant écartés et le projet Moïse confirmé (Belafatti, 2018).

À Londres, de plus en plus d’acteurs critiquent le développement résidentiel dans les plaines inondables comme celle du Thames Gateway (London Assembly, 2002). À Jakarta, le projet Garuda est également critiqué pour proposer une solution aux coûts et impacts monumentaux, sans pour autant s’attaquer à la cause première de la subsidence, c’est-à-dire l’extraction d’eau souterraine (Colven, 2017 ; Salim et al., 2019).

Les assurances dans des zones à risque ont augmenté de jusqu’à 30 % au fil des ans, ce qui touche plus de deux millions de propriétés (Herbert, 2003 ; Hussain, 2008). Aux Pays-Bas, en vertu de la politique de 1998, des zones tampons ont été désignées, qui ne seront plus protégées contre toutes les inondations. Dans ces zones, particulièrement menacées et difficiles à protéger, l’utilisation du territoire est adaptée à un risque d’inondation plus grand, mais calculé. Cela peut signifier que des habitations sont démontées et relocalisées ailleurs et que ces terres servent par exemple au pâturage. En cas de menace d’inondation, il est plus facile et moins couteux d’évacuer le bétail.

3.3 Accommodement et modèles mixtes

La plupart des pays n’ont soit pas les moyens, soit pas d’incitatif suffisant à adopter une politique de protection complète des côtes. On peut distinguer les cas de pays industrialisés affluents dont le trait de côte est tout simplement trop long et la zone côtière peuplée de manière trop éparse pour justifier une protection complète, comme le Canada, les États-Unis ou l’Australie, et celui des pays en développement densément peuplés, mais pour lesquels le coût d’opportunité de la protection dépasse celui des dommages évités (selon des critères discutables, comme nous verrons dans la section 3.5), comme c’est le cas du Bangladesh ou d’autres pays en Asie du Sud ou Sud-Est.

3.3.1 Bangladesh

La situation du Bangladesh est particulièrement problématique. Située dans la zone des moussons et aux confluents de trois des plus grands fleuves d’Asie (Gange, Brahmapoutre, Meghna), dont la plaine alluviale forme la partie septentrionale du pays, le pays est extrêmement vulnérable aux inondations (Figure 21). La mousson et les cyclones provoquent des inondations du côté de la mer et du côté des fleuves, de sorte que lors des grands cyclones, les deux tiers du pays sont parfois sous l’eau (MEF, 2006). L’intensité de ces évènements augmentera probablement avec les changements climatiques (Cruz et al., 2007). Comme l’exprime Ainun Nishat, de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), le Bangladesh est « le laboratoire de la nature pour les désastres » (Inman, 2009).

Figure 21. Modélisation de l’impact de l’augmentation du niveau de la mer sur le Bangladesh.

Note : À noter qu’il s’agit d’un modèle statique qui ne considère par l’érosion et l’accrétion, ni les protections côtières.

Source : UNEP/GRID Arendal

Malgré cette menace, la protection des 580 km de côte avec un système de digues à l’image des Pays-Bas, n’est pas envisageable compte tenu des moyens financiers limités du pays, 155e plus riche au monde avec un PIB d’environ 1900 dollars par personne par an. Le coût des 8000 km digues fluviales construites avec l’aide de la Banque Mondiale et d’autres partenaires s’élève à 10 milliards de dollars, ce qui dépasse de loin le budget annuel de l’éducation des 24 millions d’élèves et étudiants du pays (World Bank, 2010).

Ces nouvelles digues, avec celles construites continuellement depuis le XIIIe siècle permettent de protéger à des niveaux variables 24 % de la superficie du pays et 39 % des terres cultivées (Banglapedia, 2006). Les digues côtières du Coastal Embankment Project (CEP) ne protègent que des marées et tempêtes ordinaires. Elles devraient être bien plus hautes qu’en Europe pour faire face aux ondes des tempêtes de cyclones d’une hauteur de 7 m, et possiblement 9 m sous un scénario de changements climatiques (World Bank, 2010).

En même temps, la densité de population de plus de 1000 habitants par km2, la plus élevée au monde hormis quelques micro-États, rend le retrait extrêmement problématique en tant que solution.

Le Bangladesh s’est donc spécialisé dans l’accommodement et a développé plusieurs stratégies considérées comme exemplaires à l’échelle internationale (Saleemul Huq, dans Heffernan, 2012). Les stratégies d’adaptation concernent plusieurs catégories : l’utilisation du territoire, les pratiques agricoles, l’afforestation, les systèmes d’alerte et de première réponse, la création de refuges, l’éducation, entre autres.  La construction de refuges en béton sur pilotis, et sur des plateaux surélevés (Figure 22) permet à la population de se mettre en sécurité en cas d’inondation. Le reste du temps, les édifices peuvent servir d’école ou de salles communautaires (Germanwatch, 2004).

En parallèle, des systèmes d’alerte adaptés à un contexte de faibles moyens de communication (voir tableau 1 plus bas) ont été mis en place, mobilisant des dizaines de milliers de volontaires et des moyens techniques aussi simples et efficaces que des mégaphones, jumelés à une sensibilisation et éducation environnementale dans les écoles ou à travers des pièces de théâtre (IRIN, 2007).

Figure 22. Un refuge anticyclone au Bangladesh.

Source : Germanwatch, 2004.

L’agriculture, particulièrement importante dans un pays de la taille et de la densité de population du Bangladesh en autarcie alimentaire, a également dû s’adapter. Dans des zones côtières fréquemment inondées, la riziculture a laissé la place à des élevages de crevettes ou à d’autres cultures plus tolérantes aux changements de salinité (Ali, 2005).  Les cultures hydroponiques sur des lits flottants ou l’aquaculture dans des cages flottantes sont des exemples d’adaptation basées sur des techniques traditionnelles (Hossain et Hossain, 2009).

Les mesures de protection de la population ont eu un effet très positif en termes de vies humaines. Alors que le cyclone Bhola en 1970 (vents 222 km/h, onde de marée 10,6 m) a fait 500 000 morts et le cyclone du Bangladesh de 1991 (vents 225 km/h, onde de marée 8 m) 150 000 morts, le cyclone Sidr en 2007 (vents 260 km/h, onde de marée 3-5 m) a causé moins de 10 000 décès, ce qui est généralement attribué aux mesures de protection et de réponse d’urgence. À l’arrivée du cyclone, près de deux millions de personnes avaient déjà été évacuées vers les 1800 abris cyclone (IRIN, 2007). Depuis, aucun cyclone n’a causé plus d’une centaine de décès. Bien sûr, les dommages matériels et les dégâts causés à l’agriculture et aux écosystèmes, dont les mangroves des Sundarbans, sont difficiles à mitiger et poseront des problèmes pour l’adaptation future.

3.3.2 Égypte

L’Égypte poursuit également une stratégie mixte, alliant la protection à l’accommodement et à la préservation des défenses naturelles. La zone la plus menacée par l’augmentation du niveau de la mer est le Delta du Nil (Figure 23), au sein duquel se concentrent 41 % de la population, 63 % des terres arables, le tiers des pêches, et certaines des villes les plus importantes de l’Égypte comme Alexandrie ou Port Saïd (IUCC, 1993 ; El Raey, 2005). La menace est d’autant plus importante que le delta du Nil connait un déficit sédimentaire et une subsidence depuis la construction du barrage d’Assouan en 1970.

Figure 22. Scénarios d’inondation du delta du Nil en cas d’augmentation du niveau de la mer.
Trois cartes du Delta du Nil. La première est actuelle. La seconde illustre la disparition des terres avec une augmentation de 0,5 mètre du niveau de la mer. La troisième illustre le même phénomène avec une augmentation de 1 mètre du niveau de la mer.

Source : UNEP/GRID Arendal.

Présentement, l’Égypte adopte surtout des stratégies d’adaptation réactive, qui allient la protection à l’accommodation. Face à l’érosion et au retrait de la côte aux pointes exposées (76 m/an a Rosetta et 52 m/an à Damiette), des digues en béton ont été construites (Figure 24 B) (Hererer, 2010). Cependant, ces digues ne s’avéreront suffisantes que pour une augmentation du niveau de l’eau de 50 cm. La ville d’Alexandrie dépense 300 millions de dollars par an pour protéger sa côte (Johnson, 2007). Des routes surélevées servent également accessoirement de digues (Figure 24 A). La conservation de la ceinture dunaire est une priorité, puisqu’elle représente une protection naturelle importante contre les inondations et l’infiltration d’eau de mer. Ainsi, des pratiques d’excavation causant une destruction des parties fragiles de la ceinture sableuse (Figure 24 C) sont découragées. D’autres mesures d’adaptation « douce » comprennent l’utilisation de cultures plus résistantes au sel, l’installation de collecteurs d’eau et l’implantation d’une gestion intégrée des zones côtières (El Raey, 2005).

Figure 24. Stratégies d’adaptation dans le delta du Nil.

Source : Hererer, 2010.

3.4 Katrina et le principe de précaution

La catastrophe causée par l’ouragan Katrina à La Nouvelle-Orléans a démontré que des pays développés peuvent se révéler être très vulnérables face aux événements météorologiques extrêmes. Deux facteurs ont particulièrement contribué au bilan désastreux observé (Mancebo, 2006) :

  • Des défenses côtières inappropriées et un aménagement du territoire inadapté.
  • Des institutions désorganisées, fragmentées et insuffisamment préparées à un tel événement, alors que le risque était bien connu et abondamment documenté.

La catastrophe de Katrina a également démontré que les réfugiés environnementaux ne sont pas l’apanage de pays en voie de développement, même si le terme de réfugié a été mal perçu aux États-Unis pour les habitants fuyant l’ouragan et les inondations (Masquelier, 2006). En Louisiane, au Mississippi et en Alabama, un million et demi de personnes ont fui l’ouragan ; un an plus tard, plus de 400 000 n’étaient pas encore retournés (Groen et Polivka, 2006) et en 2009, la population de La Nouvelle-Orléans atteignait 77 % de celle d’avant Katrina (City of New Orleans, 2010). Beaucoup a été dit sur l’influence de la situation socio-économique et des appartenances ethniques sur l’impact de l’ouragan et la reconstruction de La Nouvelle-Orléans, parfois à tort, parfois à raison (Adeola et Picou, 2012 ; Elliott et Pais, 2006). Ainsi, bien que la population noire ait été statistiquement plus touchée que la population blanche, il est faux de penser que les quartiers inondables étaient tous habités par une population noire défavorisée (Campanella, 2007). Au contraire, certains quartiers inondables en bord de mer sont caractérisés par un revenu moyen très élevé. Également, le déclin de la proportion de population noire est moins prononcé (de 68 % avant Katrina à 61 % en 2008) que souvent perçu et s’inscrit dans une dynamique historique complexe et variable (Bankston, 2010 ; Campanella, 2007).

Le principe de précaution dans un environnement géographique vulnérable n’a pas été respecté (Campanella, 2007 ; Yarnal, 2007). En comparant la carte des inondations de 2005 avec l’évolution de l’urbanisation de La Nouvelle-Orléans (Figure 25, Figure 26 ), on constate que ce sont surtout les quartiers nouvellement créés dans des zones inondables qui ont été touchés et non les vieux quartiers comme le Quartier français. Comme à Londres, aux Pays-Bas, dans la péninsule du Cap-Vert au Sénégal ou dans la plaine du Cul-de-Sac d’Haïti (voir aussi dans les études de cas sur le Sénégal et Haïti dans le bloc 3), des zones vulnérables ont donc été développées, mais à la différence de Londres ou des Pays-Bas, sans maintenir un niveau de protection adéquat.

Figure 25. Carte des inondations de la Nouvelle-Orléans en 2005.

Source : adaptée de NOAA.

Figure 26. Carte de la Nouvelle-Orléans en 1863.

Source : Wiki commons.

3.5. L’analyse coût-bénéfice et ses problèmes

Pour justifier des mesures de protection de la côte, on a souvent recours à une analyse coût-bénéfice. Ainsi, une analyse de six mesures de protection côtière aux Pays-Bas (Olsthoorn et al., 2005) démontre que les coûts annuels actualisés atteignent 571 millions d’Euros, alors que les dommages évités en cas d’augmentation du niveau de la mer seraient de 2,89 milliards d’Euros. La protection est donc très clairement un choix économique rationnel, même si certains coûts sociaux et environnementaux liés aux structures de protection devraient être inclus dans l’analyse, ce qui peut sensiblement modifier le résultat.

La même chose est vraie pour le barrage de la Tamise, qui a coûté à 1,3 milliard de livres de 2001 (Environment Agency, 2007), alors qu’une inondation majeure dans le sud-ouest de l’Angleterre (incluant Londres) coûterait 30 milliards de livres, soit 2 % du PIB du Royaume-Uni (Wallace, 2005) ou à Tokyo, qui pourrait subir des dommages de 322 milliards de dollars en cas de débordement majeur du fleuve Arakawa (Cabinet Office, Government Of Japan, 2012 dans Cooper et Matsuda, 2013), justifiant ainsi amplement les deux milliards de dollars alloués au G-Cans Project (De Graaf et Hooimeijer, 2008 ; Water Technology Net, 2012).

On pourrait donc s’étonner que le Bangladesh, dont la longueur de côte est comparable à celle des Pays-Bas et la population presque dix fois plus importante, ne protège pas ses côtes avec des ouvrages comparables. Le tableau 1 aide à comprendre ce fait. Tandis que l’analyse coût-bénéfice fournit un incitatif fort pour la protection des côtes aux Pays-Bas, il n’en est pas de même au Bangladesh, où la valeur des infrastructures et des terres est beaucoup moindre (dix fois moins pour les terres arables), alors que les coûts de protection restent sensiblement les mêmes. Cependant, la valeur monétaire ne reflète pas la valeur sociale des terres agricoles, qui assurent 63 % des emplois et garantissent l’autosuffisance alimentaire. L’analyse coût-bénéfice doit donc être appliquée avec beaucoup de précautions. Elle n’est véritablement pertinente que dans un contexte économique où tous les échanges sont soumis à un marché, ce qui n’est pas le cas de l’agriculture de subsistance ou du troc, et omet de nombreux aspects, surtout environnementaux, tels que les services écosystémiques, pour lesquels n’existe pas de marché explicite.

Tableau 1. Comparaison des Pays-Bas et du Bangladesh
  Pays-Bas Bangladesh
Longueur de la côte (km) 451 580
Population 16 407 491 144 319 628
Densité (ha/km2) 477 926
PNB per capita ($/an) * 42 779 1 909
Coût de la terre arable ($/ha) § 30 000 3 000
Force de travail en agriculture 4 % 63 %
Nombre de téléphones/cellulaires 10 millions/12,5 millions 0,74 millions/1,4 millions

* Données de 2011 de World Development Indicators database, World Bank (2013)

§ Ayres et Walter (1991) et de Nordhaus (1991).

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